Avant propos (extrait)
La pratique de la transe s’est avérée être une rencontre m’amenant toujours plus loin car elle n’a cessé de voiler son mystère et peut-être est-ce l’essentiel de ce qu’on peut dire sur la transe : elle restera à jamais une inconnue puisqu’elle détient les clefs du jaillissement de la vie. Aller sur les traces de Dionysos m’a fait découvrir d’autres mondes, littéralement d’autres cultures, d’autres pays, mais m’a aussi initiée aux voyages de l’esprit, à des phénomènes inexplicables théorisés par d’autres croyances. A l’origine de cette quête, les difficultés rencontrées à l’hôpital psychiatrique auprès de personnes extrêmement perturbées et le désespoir sans fond des patients souffrant de boulimie et de dépendance que j’ai accompagnés. La psychologie ne semblait pas apporter un soulagement durable et adéquat, seulement l’apaisement d’une ré adaptation. La transe par contre ouvrait un autre horizon, mais au fur et à mesure du dédale de cette aventure, elle a soulevé des questions, posé des pièges et repoussé les limites. Pour essayer de comprendre et évaluer comment cet outil extraordinaire pouvait devenir une vraie thérapie dans un cadre psychologique, je me suis adressée aux pratiques du corps promouvant le changement d’état de conscience, mais aussi aux grandes religions et particulièrement au chamanisme dans différents pays. J’ai pu, au travers de ma propre expérience, interroger ces anciennes traditions sur cette délicate question de la guérison et suis revenue à la mythologie pour ramener cette expérience à notre culture. Ce livre parle de la thérapie mais essentiellement de l’espoir d’une guérison plus profonde et plus vraie qui existe dans le cœur de chacun d’entre nous. Il parle aussi de la nécessité d’élaborer un pont entre psychologie et spiritualité pour que toutes les réponses soient accessibles à l’Homme dans sa quête de mieux-être. Aujourd’hui les séminaires de développement personnel affluent et ouvrent à des expériences et des techniques autrefois réservées aux initiés. Mais le processus psychothérapeutique garde, il me semble, une spécificité à laquelle la transe peut participer lorsque nous acquérons les connaissances nécessaires. Toutes ces années de recherche auprès de différentes cultures pratiquant encore la transe aujourd’hui, aux États-Unis, en Afrique, au Groenland, au Brésil, m’ont montré que ces rituels n’étaient pas tout simplement transposables puisqu’ils véhiculent une philosophie spécifique et même une certaine vision de la guérison. Pourtant, ils détiennent quelque chose que nous avons perdu et peuvent être traduits pour devenir ce que nous considérons être un travail thérapeutique.
Finalement, le corps reste pour moi le véritable révélateur. La transe dont je parle ici est celle qui le fait parler. Travailler le corps, vivre le corps, explorer et redécouvrir le merveilleux d’être vivant, m’a amenée à étudier différentes théories et pratiques de l’énergie pour finalement aller à la rencontre de la nature, l’appréhender autrement et en faire un outil thérapeutique. La transe nous fait penser à un au-delà, elle m’a pourtant enseigné la nécessité d’être dans son corps et dans ses baskets. Trop souvent nous cherchons un ailleurs et le moment présent s’enfuit au fur et à mesure que le temps nous est dérobé. Œuvrant sans relâche sur les traces de Dionysos, j’ai osé la transe, communié avec la nature et célébré sa danse, plongé dans l’obscurité d’un chaos intérieur et exploré l’expérience multiforme de la matière, les cris, la violence, la passion et l’extase et j’en reviens avec la certitude qu’elle nous offre le chemin d’une libération